Modérateur :

  • Anne Ravard, Directrice adjointe d’In Extenso Tourisme Culture & Hôtellerie

Intervenants :

  • Catherine Bertram – Directrice de la Mission Bassin Minier Nord-Pas de Calais
  • Yann Grienenberger, Directeur du Centre international d’Art Verrier de Meisenthal
  • Pierre Sabouraud – Directeur de Saint-Nazaire Agglomération Tourisme

L’intangible au cœur de l’expérience touristique

De la muséographie à la transmission vivante ou à la création actuelle, différents leviers contribuent à valoriser les cultures et identités des territoires. Leur mise en tourisme est une œuvre collective, pour façonner des expériences touristiques innovantes et porteuses de sens.

Des offres reposant sur l’authenticité, l’ouverture et la complémentarité des outils

Si le folklore ne doit pas faire peur, parce qu’il est un marqueur identitaire du territoire, l’offre doit éviter la « folklorisation », le « terroirisme ». Ce patrimoine immatériel, ces cultures nécessairement plurielles doivent être connus, puis transmis dans leur vivacité.

Dans le Bassin Minier, l’histoire se traduit par des éléments très matériels : l’inscription à l’Unesco consacre ainsi ses paysages culturels, les terrils, et leur caractère évolutif et vivant. La Mission Bassin Minier et ses partenaires, sans être « gardiens du temple » veillent à ce que les mythes ne soient pas enfermants, à diffuser ces valeurs pour qu’elles soient réinvesties.

La construction de l’offre passe par plusieurs outils complémentaires. Sur le territoire de Saint-Nazaire mémoire et activité actuelle sont racontées via un écomusée « traditionnel », des visites d’entreprises, des sites immersifs comme Escal’Atlantic…

L’innovation numérique permet de rendre visible l’invisible, mais doit être associée à l’expérience de manipulation d’objets par exemple, ou celle d’un ressenti plus mutli-sensoriel : le bruit des chantiers ou la contemplation des paysages industriels.

Transmettre de manière vivante c’est aussi le pari du site verrier de Meisenthal, avec la sauvegarde des compétences par la formation de jeunes verriers et la conservation des collections, mais également leur « mise en culture » : aujourd’hui des designers et des artistes permettent de réinventer l’application des savoir-faire.

L’implication des habitants en continu : sans eux, pas de mise en tourisme

L’histoire du site verrier de Meisenthal part de ses habitants. C’est un travail long d’enfants du pays pour préfigurer, créer et développer le site, avec l’audace de la création, en convaincant progressivement l’ensemble des acteurs jusqu’à, aujourd’hui, porter un projet de réhabilitation – extension d’envergure.

La démarche d’inscription au patrimoine mondial de l’Unesco relève évidemment d’une logique institutionnelle moins « bottom-up ». Pour autant elle s’appuie sur un travail dans la durée de patrimonialisation, donc de prise de conscience par les habitants de la valeur de ce qu’ils ont.

La création est dans la durée un levier de (re)mobilisation des populations :
• A Meisenthal ou au 9-9 bis par exemple, la diffusion de concerts et spectacles dans un cadre patrimonial permet le croisement des usagers.
• Ailleurs des résidences d’artistes restituent une identité appropriable par les habitants et motif de fierté : les résidences-missions du Bassin Minier ou les commandes d’art public dans les quartiers à Saint-Nazaire en sont des exemples.

Des démarches croisant culture et tourisme porteuses de développement territorial et économique pour tous

Cette collaboration entre institutions et population intègre à Saint-Nazaire un troisième type d’acteur avec les industries. Les entreprises sont partie prenantes des projets touristiques, elles y contribuent techniquement et financièrement. Ils permettent à la fois le développement culturel et touristique du territoire, et la promotion des métiers industriels, en vue in fine de créer les conditions du bien-être de tous les usagers du territoire.

Les projets touristiques fondés sur la culture génèrent des flux de visiteurs qui dépenseront sur place, et créent de la formation et des emplois : on compte par exemple sept verriers permanents aujourd’hui au CIAV, et sur l’ensemble du site des jeunes sont formés aux métiers de la création et de la technique. L’ancrage territorial va jusque dans le choix d’un circuit de distribution resserré : en vendant les produits créatifs (les boules de Noël) exclusivement sur place, on crée un lien fort, un « moment vécu » de cet achat qui fidélise.

Redynamiser le territoire, c’est aussi un objectif majeur de la démarche Unesco qui est un outil d’aménagement, un projecteur et un miroir. Dans cette perspective les liens entre les acteurs de la culture et du tourisme se renforcent sur le Bassin Minier. Pour autant ce dialogue peut et doit encore être largement développé.

Crédits photo : Festival Demandez-Nous la Lune ! 2015, cie Urbaindigènes © Cadhame-Halle Verrière de Meisenthal.

Rédaction du Mag d'In Extenso TCH